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Aujourd’hui je retrouve du plaisir à faire du vélo. J’admets avoir remis en question la faisabilité de mon voyage à quelques reprises. Je suis capable de composer avec des difficultés: une circulation plus dense, de la chaleur, des côtes, des routes en moins bon état… Mais plus toutes ces difficultés s’accumulent, moins c’est agréable de faire du vélo.

Pour couronner le tout, la façon de conduire des Salvadoriens. Au Salvador, j’avais l’impression d’être dans un jeu vidéo où chaque jour, on augmentait le niveau de difficulté. Chaque jour je me demandais ce qu’ils allaient imaginer pour me compliquer la vie: des trous béants dans l’asphalte; des accotements encombrés de camions, de vendeurs, de récoltes à sécher, que je dois contourner en m’exposant aux autres conducteurs; des bus qui me frôlent le plus possible en me dépassant, des conducteurs qui me coupent en s’engageant sur la route.

Je ne sais pas dans un jeu vidéo, je n’ai qu’une vie. Si je la perds, c’est fini. Je me demandais sérieusement si mon voyage valait que je risque ma vie ainsi. Je pouvais composer avec ces difficultés une heure ou deux; au delà, je n’avais plus du tout envie de jouer à ce jeu.

Depuis que j’ai quitté le Salvador, la route est en très bon état, la circulation est moins dense, il y a beaucoup moins de côtes. Et depuis que je suis au Nicaragua, il y a beaucoup plus de gens qui circulent à vélo et je me sens plus à ma place sur la route.

Cet après-midi je me suis fait dépasser par un groupe de 7 cyclistes qui revenaient du travail. J’ai accéléré pour les suivre. Ils ont accéléré pour éviter que je les dépasse. Nous avons roulé environ 2 kilomètres comme ça avant qu’ils arrivent à destination. Ça m’a fait du bien au moral ce petit challenge.

Un peu plus loin, j’ai dépassé un jeune d’une dizaine d’années dans une montée. Il a accéléré pour pouvoir me dépasser avant de s’arrêter un peu plus loin. Le vélo est redevenu ludique. Pour couronner le tout, les derniers 14 kilomètres sont un faux-plat descendant.

J’arrive de bonne humeur à Chinandega, avec 68 kilomètres au compteur. Après m’avoir donné ma chambre, la propriétaire de l’hôtel m’apporte un verre de bon jus d’orange, courtoisie de l’hôtel. Je suis comblée. La vie est belle.